27/02/2017

Chili: En terre Mapuches

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San Martin de los Andes - Santiago du Chili ; 07/01/2017 - 20/01/2017
Je quitte avec un petit pincement au cœur mes trois amis argentins : Jorge, Ariel et Frederico. J'ai passé 15 jours de grand plaisir en leur compagnie. Mais je suis impatient de retrouver mes parents dans 15 jours à Santiago du Chili. Pour traverser la Cordillères des Andes, il faut que je franchisse le col Mamuil Malal. Il contourne le magnifique volcan Lanin, qui ce jour là est couvert de nuages. J'aperçois à peine le bas du cône. A quelques kilomètres de la frontière, la pluie se met à tomber. Je traverse un parc national avec ses pins très étranges. Nommé Araucaria araucana, ils sont considérés comme des fossiles vivants. Ils peuvent vivre jusqu'à 1000 ans.

La piste est mauvaise. Le retour au Chili s'annonce difficile.
Trois kilomètres avant la frontière il y a déjà une file de voitures stationnées.
- Pourquoi?
- Et d'un coup ! ça me revient ...
On est samedi et ici c'est les grandes vacances. Une erreur que seul un voyageur au long cours peut faire. Avec le temps qui passe et mes vacances qui n'en finissent pas , je ne sais jamais quel jour on est. Le jour de la semaine a rarement de l'importance.
Sans scrupule, je double tout le monde. Il pleut et je n'ai pas envie de passer plusieurs heures à greloter. Au poste juste avant la frontière argentine, une jeune militaire régule le trafic. En me voyant, elle a pitié de moi, et me fait signe de passer la barrière et de me rendre au bâtiment de service des douanes. Quand j'arrive, le poste frontière est plein à craquer. Un fonctionnaire s'occupe de diriger les gens au bon guichet. En voyant que je suis cycliste, il prend mon passeport et fait toutes les formalités pour moi. Il passe devant tout le monde et deux minutes plus tard je quitte le poste frontière avec mon tampon de sortie en bonne et due forme. Ça a parfois du bon d'être cycliste !!!



A la douane chilienne c'est un peu plus long et fastidieux. Mais en 30 minutes j'obtiens mon tampon d'entrée et me voilà officiellement au Chili. J'avais quitté ce pays il y a 15 jours sous la pluie et je le retrouve avec le même mauvais temps. Je n'ai qu'une seule envie : rejoindre la côte pacifique et profiter de la chaleur et des plages !
Je ne m'attarde ni à Pucón ni près du volcan Villarica ( un des rares volcans avec un lac de lave dans son cratère ) . Il fait froid et je suis trop mouillé. L'envie de me balader ne m'effleure même pas l'esprit.

Je rejoins la Panaméricaine, une "route" longue de 30000km, de l'Alaska au sud du Chili, et je file vers Temuco. Je ne sais pas si je suis autorisé à rouler dessus en vélo. Il n'y a aucun panneau interdisant l'entrée des bicyclettes. Je m'insère sur la voie la plus proche. Quelques centaines de mètres plus loin, je passe discrètement un poste de police sans me faire arrêter. Ouf ! Je suis sûr que je peux rouler sans problème.
Mais qu'est-ce que le Chili est peuplé !!! Après un mois et demi en Patagonie j'avais presque oublié qu'à certains endroits de la planète les hommes se sont regroupés en masse. Le moindre endroit est habité ou cultivé.

Les collines sont plantées de grandes forêts "artificielles" de pins et d'eucalyptus que les Mapuches appellent "désert vert", car cet arbre qui n'est pas originaire de cette région demande beaucoup plus d'eau que les spécimens natifs.
Les Mapuches sont les habitants originels de cette terre.  C'est un peuple de guerriers qui a résisté à l'envahisseur Inca venant du nord. Comme beaucoup de peuples  en Amérique ils ont été dépossédés de leurs terres au XIXème siècle par les émigrants européens, mais ils continuent à se battre pour faire valoir leurs droits sur les terres de leurs ancêtres. Leurs revendications s'affichent sur le bord de la route sur de grandes banderoles ou tout simplement écrites à même la route. Je comprends leurs sentiments dans ce pays où les espaces publics ne semblent plus exister. Tout est privé. Tout le long de la route il y a des barbelés. Heureusement certaines âmes charitables les ont coupés. Une ouverture bienvenue afin que je passe mes nuits au frais au milieu de grands pins.

La chaleur est venue d'un coup. Dès que j'ai quitté les Andes, elle m'est tombée dessus comme une enclume. Depuis sept mois et juin 2016, je n'avais ressenti la vraie chaleur du soleil. Celle qui te brûle, celle que tu veux fuir. Pour la première fois depuis des lustres, j'apprécie l'ombre !
Les routes de campagne jusqu'à Concepcion sont en bon état et goudronnées. Mais il n'y a toujours pas de bandes d'arrêt d'urgence ☹ . Les chiliens ne sont pas les plus respectueux des cyclistes. "Moins pire" que l'Asie mais dangereux.
Je retrouve enfin le grand plaisir de manger des fruits et des légumes. C'est l'été, les pêches, melons, pastèques, ... remplissent les étalages des vendeurs de bord de route. Les prix sont raisonnables: 1000 pesos (1.5€) le kg de pêches, 500 pesos (0.75€) le melon. Certains jours je ne mange que des fruits. Ça m'avait manqué. Et puis avec la chaleur je n'ai plus trop envie de me gaver de gras et de sucre.

A Concepción, je retrouve le bord mer et les plages. Le petit vent de la mer me rafraichit un peu et je supporte plus facilement la chaleur. Il fait plus de 30°C à l'ombre.
Comme à mon habitude, je ne m'éternise pas dans cette grande ville de 300 000 habitants.


C'est les grandes vacances à Tomé, une station balnéaire, où les plages sont pleines, mais peu de personnes profitent de l'eau. En effet l'eau est plutôt fraîche, guère plus de 17°C. En passant près d'un petit marché aux poissons je m'arrête et j'observe un lion de mer qui essaye de se remplir la panse sur les étalages de poisson frais.  Les pêcheurs le chassent à force de bruit en tapant à grands coups de bâton sur des seaux en plastique. L'animal, une belle bête de 2 mètres et plusieurs centaines de kilos, s'enfuit doucement.
Quelques kilomètres après la sortie de Tomé, je rencontre un français qui vit au Chili depuis plus de 10 ans. Il se balade avec son vélo de route. On roule quelques kilomètres ensemble avant de s'asseoir pour déguster un mote con huesillo: une boisson composée d'un jus sucré, d'une pêche séchée rehydratée et de grains de blés. Bien rafraichissant et nourrissant.

La route de bord de mer est bien vallonée. Les arpenteurs chiliens n'aiment pas les virages, ils préfèrent les routes à fort pourcentage. Les camions chargés de bois souffrent tout autant que moi.  Mon thermomètre affiche 41°C. Les plages sont couvertes de sable noir, elles sont brulantes l'après midi et la température de l'océan est vraiment fraîche. Je passe mon tour. Je me baignerai une autre fois. A Cobquecura j'apercois des dizaines de lions de mer en train de se faire dorer la pillule sur un grand rocher. Ces animaux sont en nombre dans les environs, tout près de la civilisation.
Je continue par la côte avant rentrer dans les terres direction "Santiago de Chile". Je rencontre Yohan aux alentours de Constitución. Un jeune allemand de 23 ans parti de chez lui il y a 4 ans. Il arrive de Colombie où il a passé plus d'un an. Il a travaillé sur place et appris l'espagnol. On boit quelques bières ensemble, et puis on reprend chacun notre route. Il va vers le sud à l'opposé de ma direction.
La province au sud de Santiago est en feu. Il y a des dizaines d'incendies qui ravagent les plantations d'eucalyptus. Je dois modifier mon itinéraire pour éviter les routes coupées.
Le dernier jour avant de rentrer dans Santiago, je m'arrête dans un camping avec une grande piscine. J'en profite tout l'après-midi. La belle vie !!!

A Santiago du Chili je suis hébergé chez des amis de ma cousine, Florent et Philo, un jeune couple de français vivant au Chili depuis plus d'an. Encore une belle rencontre !

Statistiques

Distance :  1219 km
Nb jours : 14
Nb jours de vélo : 13
Nb jours de repos : 1
Etape la plus longue : 161 km
Etape la plus courte :  38 km

Total depuis le début

Distance : 34607 km
Nb jours : 479
Nb jours de vélo : 336
Nb jours de repos : 143
Etape la plus longue : 257 km ( Australie, Nullarbor)
Etape la plus courte : 26 km
Plus haut col : 3045 m (Yunnan, Chine)
Crevaison : 11
Rayon cassé roue arrière: 9 ( ancien vélo décathlon à 100€)
temp. max/min : 49°C ( Australie) / -8°C ( Australie)





La Suite...

14/02/2017

Patagonie : au rythme argentin

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Futaleufu - San Martin de los Andes ; 20/12/2016 - 06/01/2017
Je quitte le camping de Futaleufu direction l'Argentine. Je veux passer à l'est des Andes, là ou le temps est sec et venteux.
Je pars sous la pluie et après le passage obligé par la douane chilienne, la route se transforme en piste caillouteuse. Peu m'importe, je suis en Argentine et la pluie a cessé. Devant moi un grand ciel bleu, derrière des nuages. Ça me redonne le sourire !
Je passe ma première nuit au sec depuis 10 jours. Le deuxième jour à la sortie d'Eskel, je retrouve le vent patagonien qui souffle dans mon dos d'une telle force que je roule à 32km/h sans pédaler ☺. Ca ne dure que 5 km. Ensuite la route reprend la direction du nord avec un vent de face. Quelques kilomètres plus loin, j'aperçois deux cyclistes qui se reposent. Jorge et Ariel, deux argentins qui parcourent la Patagonie pendant leur mois de vacances. Ils vont dans la même direction que moi. On repart ensemble direction le "vent de face". Les paysages ressemblent vraiment à ceux que j'ai vus lors de mon précédent passage sur la ruta 40 entre El Calafate et Perito Moreno. Immense vallée sans arbre, seul quelques touffes d'herbes jaunies par le soleil et le vent réussissent à pousser. Je ne me lasse pas de cette immensité. Même si le vent souffle assez fort, la beauté du paysage efface la difficulté. Avec Jorge et Ariel le courant passe bien. On décide de poursuivre notre route ensemble. Le rythme est bien moins soutenu qu'à mon habitude. Mais j'apprécie la compagnie de ces deux argentins. Même si mon espagnol est toujours aussi mauvais on arrive à échanger. Jorge parle un peu anglais. Avec ces deux langues on peut presque discuter politique !
On roule entre 3 et 5h par jour, entre 50 et 70km. Les journées suivent un rythme bien précis. Au petit matin à 9h on commence par un bon maté bien chaud et on attend que le soleil sorte pour nous réchauffer. Ensuite entre dix et onze heures on se met à pédaler. A mi-parcours, on s'arrête pour un petit goûter. Puis on reprend la route avant de trouver un endroit pour la nuit. On monte la tente, on boit du maté, on mange un bon repas chaud : pâtes ou polenta avec du fromage. Et au dodo !!
La route n'est pas montagneuse mais c'est toujours un peu vallonné. On alterne entre 600 et 1000 mètres d'altitude. Après 3 jours de route commune, le 23/12/2016 on s'arrête à El Bolson. Au camping de la Brasserie


Les argentins aiment la viande. Ce n'est pas une légende. Tous les gens du camping font griller de la viande. Et on fait de même : 3kg de bœuf pour trois. Le tout arrosé de bières locales et de vins rouges argentins. Une bonne entrée en matière avant Noël. Ici c'est l'été et pour fêter la naissance de Jésus on mange de la viande grillée. Et puisqu'on est en Patagonie et que leur agneau est fameux dans le monde entier,  Ariel et Jorge cuisinent pour le repas de Noël, un demi-agneau (5kg) et des légumes au four à bois, sans oublier le vin rouge pour accompagner la viande. Un régal, je mange jusqu'à exploser. Ca fait tellement longtemps que je n'avais pas mangé de viande ! Ils me font également goûter l'oeuf battu cuit dans un demi-poivron: vraiment bon. Comme dit Jorge : "avec nous c'est un court intensif d'argentin"
Le ventre et la tête lourde on repart vers le nord. Les paysages changent à mesure que l'on se rapproche de la région des sept lacs (Siete Lagos), ça devient beaucoup plus vert. A San Carlos de Bariloche on s'arrête dans un camping. Le gérant a la gentillesse d'ouvrir spécialement pour nous. L'ouverture officielle n'est prévue que le lendemain. La ville réputée pour son chocolat n'a rien d'extraordinaire. Le bord du lac est joli mais la cité en elle-même est quelconque. Comme dans la plupart des villes argentines que j'ai traversées les rues sont en mauvais état. Beaucoup de devantures de boutiques sont décrépies. Ce n'est pas sale mais c'est loin d'être neuf. Le temps a fait des "ravages". Avec le traditionnel asado (bbq), on achète du chocolat: 680 pesos le kg (40€). Ça fait mal au portfeuille mais il est très bon. Et puis au moins c'est du chocolat noir, contrairement aux supermarchés qui vendent presque exclusivement du chocolat au lait.

La route des septs lacs est magnifique. Elle longe ces grandes étendues d'eau. La vue est splendide. Le temps est clément, il fait 20°C au soleil. Pas de pluie, quel plaisir ! A Villa la Angostura, on s'arrête pour fêter le nouvel an. L'avant veille on se met en jambe avec un "pollo al disco" (poulet au disque). La recette est simple mais excellente : poulet, légumes, vin blanc et épices, le tout cuit dans un grand disque en fonte posé sur le feu.
Les argentins sont connus pour aimer faire la fête. Idée reçue vérifiée pour le jour de l'an: grillades, musique, karaoké, bières et vins, sans oublier le spécial : Fernet-cola, un "cocktail" à base de fernet branca, un alcool amer et de coca cola. Plutôt pas mal, mais le lendemain la tête s'en souvient !
Comme après chaque arrêt dans un camping, je repars "fatigué" (trop d'alcool). On décide de quitter la belle route goudronnée pour suivre une piste qui va en direction de Villa Traful. La piste, à certains endroits est vraiment pentue. Jorge et Ariel tirent la langue ☹ et moi aussi. L'état de la piste est variable, tantôt très bonne, tantôt très caillouteuse. A Villa Traful on rejoint Fredirico, un ami de Jorge et Ariel. Nous voilà quatre sur la route. Plus on est de fous plus on rit ! La piste continue vers le col paso cordoba. Une montée bien raide mais au sommet ou plutôt au col la vue est magique. Le vent soufflant fort, à la tombée de la nuit on demande l'hospitalité au gardien d'un entrepôt du service d'entretien des routes (la DDE argentine). Il vit tout seul, dans une petite maison au milieu de nulle part. Comme souvent, il accepte notre requête sans hésiter. Il nous installe dans l'entrepôt, près du poêle à bois entre un engin et un tas de bûches. On le fait ronronner sans hésiter. Le vent à l'extérieur souffle vraiment très fort, le toit en tôle se soulève à chaque rafale. Mais il tient le coup. La chaleur du poêle est la bienvenue. On passe une nuit trois étoiles avec un bon maté bien chaud et un énorme plat de polenta au fromage. Il en faut peu pour satisfaire des cyclistes affamés.


Avant d'arriver dans la ville de San Martin de Los Andes, on passe un col à 1000 m. La montée n'est pas très difficile mais dans la descente la pluie fait son apparition, la température chute d'un coup. Elle passe de 15°C à 5°C. On se gèle toute la descente. Mes vêtements de pluie sont bien rangés au fond du sac. J'avais perdu l'habitude de les utiliser ces 15 derniers jours. La Patagonie nous rappelle que le temps peut y être imprévisible ! En bas de la descente, à San Martin de Los Andes on s'arrête dans un camping et la douche chaude  nous réchauffe le corps et le cœur.

Toutes les bonnes choses ont une fin. Après deux dernières soirées bien arrosées. On se dit au revoir. Je prends la route du Chili vers l'ouest pour rejoindre mes parents à Santiago du Chili. Jorge, Ariel et Frederico restent en Argentine et continuent par la route 40 vers l'est.
J'ai adoré ces 15 jours en leur compagnie : "Muchas gracias amigos"

Statistiques

Distance : 734 km
Nb jours : 18
Nb jours de vélo : 12
Nb jours de repos : 6
Etape la plus longue : 75 km
Etape la plus courte :  30 km

Total depuis le début

Distance : 33388 km
Nb jours : 465
Nb jours de vélo : 323
Nb jours de repos : 142
Etape la plus longue : 257 km ( Australie, Nullarbor)
Etape la plus courte : 26 km
Plus haut col : 3045 m (Yunnan, Chine)
Crevaison : 11
Rayon cassé roue arrière: 9 ( ancien vélo décathlon à 100€)
temp. max/min : 49°C ( Australie) / -8°C ( Australie)




La Suite...

05/02/2017

Patagonie : La carretera austral

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Perito moreno - Futaleufú ; 10/12/2016 - 19/12/2016
Je quitte Raul et son formidable mini camping. L'accueil et la douceur "dingue" de Raul me fait presque regretter mon départ vers la Carretera Austral au Chili. La construction de la carretera austral a été débutée en 1976 sous la dictature de Pinochet. C'est l'armée chilienne qui a exécuté cette lourde tache. 10000 militaires ont travaillé afin d'établir un lien entre le centre du Chili et la Patagonie chilienne. Beaucoup d'entre eux y ont perdu la vie. La route est longue de 1240 km, de Puerto Montt à O'Higgings. En fait cette route désenclave seulement 100 000 personnes.
J'ai décidé de rejoindre cette route car tous les voyageurs qui l'ont empruntée en sont revenus ravis: paysages magnifiques au milieu des montagnes, cascades, glaciers, fjords, rivières et peu de trafic
Tout semble réuni pour que je passe quelques jours magnifiques à l'ouest des Andes.

De Perito Moreno jusqu'à la carretera austral, la route prend la direction du soleil couchant. En Patagonie, rouler vers l'ouest n'est jamais facile à cause du vent. Heureusement Raul m'a bien nourri et même avec ce fort vent de face mes jambes tournent facilement. Je n'avance pas très vite alors que la route est plate, 10km/h. C'est la dure loi du cycliste qui a choisi de remonter la Patagonie vers le nord. A mesure que je me rapproche du Chili les paysages changent: fini le jaune, le marron et le ciel bleu, place au vert et aux nuages.
Après la frontière chilienne et le village de Chile Chico la route goudronnée s'arrête et la piste qui suit le lac General Carrera, le plus grand du Chili, commence. La piste est bien entretenue à cause de la compagnie minière Cerro Bayo qui exploite les abords du lacs pour en extraire de l'or et de l'argent. Les montées descentes se succèdent mais la difficulté est effacée par les beautés du paysage. La route est parfois creusée dans la roche et le lac affiche un panel de couleur allant du bleu glacier au vert en fonction des rares rayons du soleil.

Les jours suivants, la pluie se met à tomber. La belle piste se transforme en bourbier et je suis obligé de pousser dans les montées. Mes garde-boues font bien leur travail : ils accumulent la boue !!! . Mes roues se bloquent et je suis obligé d'enlever la boue avec un morceau de bois pour pouvoir simplement continuer à avancer ! Je décide d'enlever les gardes-boues. Tant pis pour les projections en cas de pluie. Les températures sont fraîches à cette latitude (46° Sud): il fait 12°C et le vent souffle assez fort.

Au détour d'un virage je rencontre un couple de Français en 4x4. Ils m'offrent un café chaud et des gâteaux: de quoi me réchauffer pour quelques minutes.


Après deux longues journées j'atteins enfin la carretera austral. Il est temps de remonter plein nord. Le vent souffle toujours du nord-ouest, presque en pleine face. Le soleil ne veut pas se montrer et les averses se succèdent. La piste est couverte de tôle ondulée. C'est loin d'être l'extase ! Je fais de longues journées de pédalage pour essayer de fuir ce temps froid et pluvieux. Quand il ne pleut pas, il fait du vent. Et parfois j'ai droit au deux en même temps. Lorsque je lève la tête je n'aperçois jamais les sommets des montagnes. Je vois juste du gris. Les paysages sont peut être magnifiques mais avec un temps aussi mauvais, il est impossible de les apprécier. Je me languis d'une chose : repasser à l'est en Argentine. Je préfère largement le vent à la pluie gelée. Lorsque la route ou plutôt la piste monte, les températures chutent. Et même si les altitudes ne sont pas très hautes (1200 mètres max), il fait froid. C'est la première fois que j'ai les pieds gelés. J'ai dû me fabriquer des sur-chaussures étanches avec un vieux ciré trouvé au bord de la piste. Eh oui! le bord des routes est une source de matériel inépuisable pour peu qu'on sache bien se débrouiller.

Il faut tout de même positiver: avec cette pluie, les rivières et les petits ruisseaux sont pleins et je ne transporte jamais plus d'un litre d'eau. Pas besoin non plus de se doucher puisque la pluie me "rince" à longueur de journée. La route est parfois goudronnée, ce qui me permet de fuir plus rapidement ☺ Je me ravitaille en pain et fromage dans les petits villages le long de la route. Même si le plaisir de rouler fait défaut, le plaisir de manger est toujours là ! Et puis je croise au moins 5 cyclistes par jour. Ça permet de me changer les idées en prenant le temps de discuter. Même si les premiers sujets tournent toujours autour de la météo et de l'état de la route. Les zones où la route n'est pas goudronnée sont souvent en mauvais état : tôle ondulée ou cailloux et les zones de travaux sont encore pire. Ça ressemble plus à une piste de 4x4 boueuse qu'à une route. Le personnel qui travaille à l'entretien de la route est toujours habillé de la tête au pied avec un ciré. Le sourire n'est pas de mise, signe qu'ils ne sont pas plus satisfaits que moi d'être dans cette Patagonie froide et pluvieuse. Et encore  c'est la fin du printemps! En hiver, les conditions doivent être encore plus difficiles. La vie dans cette région est rude pour tous les habitants. Je leur tire mon chapeau !!!


Je pensais passer 10 jours de plaisir au milieu de paysages grandioses mais ce ne fut en fait: froid, vent et pluie: un cocktail au goût amer.

Mon souvenir le plus marquant durant cette galère: le gaucho avec ses bottes luisantes, son poncho, son chapeau et son cheval trottinant sur une route goudronnée avec une tronçonneuse à la main. Un mélange entre tradition et modernité.

Statistiques

Distance :  907 km
Nb jours : 10
Nb jours de vélo : 10
Nb jours de repos : 0
Etape la plus longue : 125 km
Etape la plus courte :   56 km

Total depuis le début

Distance : 32654 km
Nb jours : 447
Nb jours de vélo : 311
Nb jours de repos : 136
Etape la plus longue : 257 km ( Australie, Nullarbor)
Etape la plus courte : 26 km
Plus haut col : 3045 m (Yunnan, Chine)
Crevaison : 11
Rayon cassé roue arrière: 9 ( ancien vélo décathlon à 100€)
temp. max/min : 49°C ( Australie) / -8°C ( Australie)



La Suite...

15/01/2017

Patagonie : Perdu dans l'immensité

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02/12/2016 - 09/12/2016 ; Cerro Castillo - Perito Moreno
Pas de chance, juste avant que j'arrive au poste frontière argentin un bus bondé me double. Patience, de toute façon je suis en grandes vacances et j'ai du temps à revendre . Après une petite heure d'attente, le douanier argentin tamponne mon passeport. Me voilà en règle sur le territoire argentin.
Je prends la mythique ruta 40. J'ai la chance de me diriger vers l'est, j'ai enfin le vent dans le dos. Je roule à 25km/h sans forcer sur un goudron tout neuf. A la bifurcation vers El Calafate je prends la route provincial 7 ou ex route 40. Des cailloux et du gravier sur les bords, au bout de 4km j'abandonne. Je fais demi-tour et je reprends la route 40 avec le vent dans le dos. Tant pis, même si je dois faire un détour de 100km. Je profite de mes premiers kilomètres depuis Ushuaia où je ne me bats pas contre le vent. J'avale les 80km jusqu'à la ville La Esperanza en 3 heures. Franchement, il faut avoir beaucoup d'espoir pour vivre dans cette ville paumée où la moitié des maisons sont en ruines. Manu Chao chante : "proxima station esperanza". J'espère qu'il ne parle pas de cette ville. L'espoir y est sûrement passé ... il y a très longtemps !!!
Je trouve un vieil abri de chantier en brique à la sortie de la ville et je passe une bonne nuit. Après 160km, j'ai toujours le sommeil lourd !

Le lendemain, fini les vacances. Je retrouve le vent de face, vitesse moyenne 10km/h, aucune protection. Une longue journée de combat. A 30km d'El Calafate, vers 18h, j'aperçois des peupliers. Une bonne protection pour planter ma tente avec ce fort vent. L'espace n'est pas protégé par des barbelés mais il se trouve à 100 mètres  d'une maison. Je commence à déballer mes affaires,  immédiatement les chiens se mettent à aboyer, et un vieux monsieur sort de la maisonnette. Je vais le voir et lui demande:
- Est-ce que je peux dormir à l'abri des peupliers?
Il regarde autour de moi et me répond par une question:
- Est-ce que tu es seul?
- Je réponds oui
et il m'invite spontanément chez lui, une petite maison faite de béton, tôle, bois, un mix qui résiste bien au vent. L'intérieur est sombre, éclairé par une toute petite fenêtre. Avant toute chose il me propose le maté. C'est un rituel dans cette partie de l'Argentine. Une petite tasse remplie au 3/4 de maté, une paille filtrante et une bouilloire avec de l'eau chaude. On verse un peu d'eau chaude dans la tasse et on aspire avec la paille. Celui qui sert l'eau boit toujours en premier. Ensuite c'est chacun son tour. Mais c'est toujours le même qui verse l'eau chaude. J'aime bien cette manière de faire, ce partage.
Il ne parle pas un mot d'anglais et son espagnol est beaucoup trop rapide pour moi. Quand je le fais répéter, il parle plus fort et plus vite. Je vois bien que ça l'énerve Mais je ne comprends pas mieux. Ce vieux est à l'image de la Patagonie à la fois généreux et rude. Il a du mal à accepter que je ne comprenne pas les choses simples qu'il me raconte. Mon espagnol est toujours aussi mauvais, mais j'espère bien que demain il sera meilleur
Au bout d'une demi-heure il sort sa radio à pile et écoute une émission. Il n'a ni l'électricité ni l'eau courante. C'est groupe électrogène et eau de la rivière qui coule à 50m. Après un diner bien riche (poulet patate et riz cuisiné avec du gras), il allume le poêle à bois, démarre le moteur, enlève le drapeau argentin qui couvre la télé cathodique et regarde une émission de variété. Il se marre bien, moi je ne comprends rien !
Je passe la nuit au chaud dans un lit près du poêle et au petit matin je le remercie chaleureusement avant de reprendre ma route contre le vent.


Je fais un détour de 30km jusqu'à El Calafate pour me ravitailler en nourriture. Pain, mayonnaise, fromage, avoine, maïs, fruits secs. De quoi tenir 5 jours en autonomie. Sur la route je croise un couple d'anglais puis Arthur, un jeune français qui a l'intention de rejoindre l'Alaska en vélo. On passe une heure à discuter de tout et de rien. C'est toujours plaisant de discuter dans sa langue natale avec un grand voyageur.
La route 40 longe deux grands lacs, l'Argentino et le Viedma. Les rivières qui s'y déversent sont de couleur bleu "glacial". La route est bien vallonnée et rarement plate. Le vent ne souffle pas trop fort et à la fin de la journée j'ai fait 120km sans trop forcer. Je squatte un ancien restaurant abandonné, une place bien connue des cyclotouristes, j'y retrouve le couple d'anglais que j'avais croisé le matin.

Au croisement avec El Chaltén je choisis de poursuivre sur la route 40 et de ne pas bifurquer vers le Chili et la Carretera Austral. Pour deux raisons principales : l'argent et l'immensité. Pour rejoindre le Chili par El Chalten il faut prendre un chemin de randonnée puis deux bateaux qui coutent 70 et 30€. Une bonne arnaque de mon point de vue ! Et puis j'ai envie de rouler au milieu des estancias, perdues dans l'immensité de la Patagonie argentine.
La carretera austral est une route fameuse dans le petit monde des voyageurs à bicyclette qui passe au milieu de petites montagnes et est réputée très jolie. Je la rejoindrai plus tard à Perito Moreno.
Perdu dans l'immensité de la Patagonie, c'est exactement là où je me trouve. La route passe dans des vallées immenses où le vent s'engouffre et souffle de toutes ses forces: pas d'arbre, peu de rivière et encore moins de ville.
Bienvenue dans la pampa. Quelques camions et voitures, je croise 10 véhicules par jour. Je suis seul au monde !!!
En dehors des deux villes que sont Tres Lagos et Gibernador Gregores, seules quelques estancias jalonnent la route. Leurs marques sont  présentes tout le long de la route avec les barbelés qui délimitent les pâturages pour les moutons et les vaches. Certaines estancias possèdent plus de 20000 moutons !!!
Durant ces 7 jours sur la route 40 j'ai beaucoup roulé, entre 8h et 11h par jour: entre 120 et 220km. Le régime de vent suit un schéma assez régulier. De 5h à 12h il souffle faiblement, voire même pas du tout. Dans l'après midi il se lève et peut souffler très fort, bien sûr, contre moi !
Le matin j'arrivais à faire plus de 100km et l'après midi si le vent soufflait fort, je faisais seulement 50 ou 60 km, sur la même durée. De longues journées de vélo où je mangeais 4 gros repas par jour pour éviter la fringale redoutée des cyclistes.
Planter la tente dans ce paysage battu par les vents et sans protection n'est pas recommandé, aussi j'ai squatté deux abris de chantiers abandonnés. Un soir après une journée bien remplie, alors que le vent soufflait très fort et qu'un orage s'abattait sur moi, j'ai tapé à la porte d'une estancia.  J'ai juste demandé un coin pour planter ma tente à l'abri du vent, en effet les estancias sont toujours entourées par des peupliers. Le chef de famille m'a conduit vers une petite habitation. Lit, poêle à bois, cuisine, eau potable. Le grand luxe !!!
La générosité de cette famille a encore été étonnante.


La vie sauvage le long de la route m'a surpris. Beaucoup de guanacos ( lama) et de Rheas (proche des petites autruches et des émeus). Ces "lamas" sont bien adaptés aux conditions arides et froides de cette région.  Pour ces animaux, les barbelés ne sont pas un problème, les rheas passent au travers moyennant quelques efforts et les guanacos sautent dignement par dessus. Même le plus beau cheval de compétition sautant par dessus un obstacle n'est pas aussi élégant. Le spectacle du "saut de guanaco" au dessus des barbelés est magnifique. Malheureusement certains se ratent, restent coincés et meurent à petit feu. Triste vision .
Comme dans le désert australien avec les vaches, moutons et chèvres, ces guanacos sont effrayés par les cyclistes. Un 38 tonnes peut passer, ils ne bougent pas. Par contre quand j'arrive ils détalent comme des fous furieux. C'est la fin du printemps et  il y a beaucoup de jeunes. Les adultes sautent facilement les barbelés mais pour les plus jeunes c'est une autre histoire. Ils courent le long de la route à la recherche d'un trou. Et quand les barbelés sont neufs ils peuvent courir plusieurs kilomètres. Un matin, un jeune guanaco a couru plus de 20km en ma compagnie. A 20km/h, pas mal !! Il s'est ensuite effondré de fatigue, avant d'avoir le réflexe tout simple  de faire demi-tour et de s'éloigner du terrifiant cycliste !!
Par curiosité je m'approche afin de voir la bête de plus près et je m'aperçois qu'elle n'a pas de sabots mais des gros coussins sous les pattes.

Arrivé à Perito Moreno, je cherche un camping pour me reposer de ces 7 jours intenses. Les hôtels sont beaucoup trop chers en Patagonie. Je pose mes affaires au "mini camping Raul". Raul tient un mini camping en plein centre ville sur le bout de jardin qui jouxte sa maison. Il m'accueille avec le maté et débite un monologue en espagnol pendant plus de 20 minutes. Je ne comprends pas grand chose mais ce type à l'air sympa, à la fois doux et dingue. 150 pesos, 9€ avec wifi, douche chaude et cuisine.
Raul a 70 ans, ancien policier, il tient ce mini camping depuis plus de 20 ans. Je passe deux jours extraordinaires en sa compagnie. Il me régale avec du maté,  des pâtisseries, des escalopes milanaises, des pâtes aux moules, ... La nourriture est comprise dans le prix de journée. Raul me nourrit ... aussi de paroles car il aime beaucoup parler !! C'est de loin le meilleur endroit payant où j'ai séjourné.

Maintenant il est temps de passer à l'ouest des Andes, au Chili et suivre la carretera austral.

J'ai vraiment apprécié ces quelques jours dans cette immense Patagonie. Les paysages sont grandioses et sauvages. Un endroit à la fois rude à l'extérieur et tendre à l'intérieur. J'adore !!!

Statistiques

Distance :  1033 km
Nb jours : 8
Nb jours de vélo : 7
Nb jours de repos : 1
Etape la plus longue : 222 km
Etape la plus courte :  120 km

Total depuis le début

Distance : 31747 km
Nb jours : 437
Nb jours de vélo : 301
Nb jours de repos : 136
Etape la plus longue : 257 km ( Australie, Nullarbor)
Etape la plus courte : 26 km
Plus haut col : 3045 m (Yunnan, Chine)
Crevaison : 11
Rayon cassé roue arrière: 9 ( ancien vélo décathlon à 100€)
temp. max/min : 49°C ( Australie) / -8°C ( Australie)


Petit coucou à Daniel et Sabina




La Suite...

05/01/2017

Patagonie : le vent te soufflera

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26 novembre 2016 - 01 décembre 2016 ; San Sebastian - Punta Arenas - Cerro Castillo
10km de piste poussiéreuse et caillouteuse séparent le poste  frontière argentin et chilien à San Sebastian. Le vent n'a pas de frontières et me gifle pleine face. Bienvenida a Chile !!!
Pas de problème de visa comme en Asie, tout est simple ici. Un tampon pour trois mois !!! Les douanes chiliennes sont juste un peu à cheval sur l'importation de nourriture. Fruits, légumes, miels, viandes sont interdits. De toute façon je n'en ai pas !
Je me dirige vers le détroit de Magellan. La piste jusqu'à Porvenir n'est pas des plus lisses. Certains passages sont bien caillouteux. Ce n'est jamais un plaisir avec un vélo chargé. Les camions me couvrent de poussière et me font toujours le plaisir d'un coup de klaxon et d'un signe de la main.
Pas un arbre, du vent soufflant en continu à 60km/h avec des rafales encore plus fortes. Le coin n'est pas un paradis pour campeur. Mais je suis sauvé quand j'aperçois un abri de chantier. Un bon squat pour une nuit protégé du vent.
Près de Porvenir la route passe au bord de mer avec la vue sur la côte ouest du détroit de Magellan et les montagnes aux sommets enneigés. Un bel accueil !!!
Porvenir a la saveur d'un port du bout du monde. Bâtiments abandonnés, abris en tôles rouillées, maisons décrépies et une boite de nuit ! Heureusement il y a une boulangerie où je me ravitaille en pâtisseries locales .

En compagnie de deux cyclistes brésiliens, je traverse le détroit direction Punta Arenas. Le vent souffle toujours fort et les vagues donnent du fil à retordre au ferry. Je n'ai jamais vu un bateau de cette taille se faire autant balancer par la mer. A 21h on débarque à Punta Arenas.Les bomberos (pompiers) généralement accueillent les voyageurs en quête d'un abri pour la nuit. Malheureusement ce soir ce n'est pas possible. On se rabat sur un terrain vague au nord de la ville et on plante la tente à l'abri du vent.
Au matin, le vent est terrible. Un de mes deux compères se fait littéralement souffler par le vent à un croisement. Il mord la poussière, ou plutôt le goudron. Le vent vient de l'ouest et la route va plein nord. Un vent de côté de cette force est bien trop dangereux.
Repos forcé. Les hébergements et la vie en général ne sont pas donnés au Chili. Je me rabats sur un camping. C'est un hôtel qui a quelques mètres carrés de pelouse. Il n'y a pas de petit profit. 5000 pesos la nuit, 7€. J'ai besoin d'une bonne douche et de laver mes affaires, même si ça ne me plait pas trop de payer pour planter la tente.
Je me balade dans la ville et profite de cette journée de repos pour prendre du bon temps. Punta Arenas n'a rien de magnifique à offrir. C'est juste une ville parmi tant d'autres. Le soir venu près du camping, je sors mon ukulele et gratte quelques accords.
Une fille m'accoste et on discute quelques minutes puis deux hommes arrivent. Après les présentations, ils m'écoutent jouer du ukulele. Mes premiers spectateurs !! Une fois la maison close ouverte, elle s'en va travailler et les clients aussi. Je me retrouve tout seul. Eh oui, je me suis fait brancher par une catin qui travaille à quelques mètres du camping!! Elle m'a même demandé mon Facebook, dommage je n'en ai pas !



Le vent souffle toujours fort mais le lendemain je pars quand même. 6km/h sur le plat, aucune protection. C'est juste insensé, comment le vent peut-il souffler aussi fort ? Physiquement et mentalement c'est dur. Je me bats contre une force invisible, je n'avance pas !!! A 500 mètres devant moi un camion s'arrête, il me faut plusieurs minutes pour l'atteindre. Quand j'arrive à sa hauteur, il me propose de monter. Il a pitié de moi. Je n'hésite même pas une seconde. On attache le vélo et je monte côté passager. Après 25km, je descends, il va vers Rio Gallegos et moi Puerto Natales. Gracias el amigo !! Je remonte sur mon vélo et repars face au vent. A certains endroits, je descends de vélo et je pousse tellement le vent est fort. Impossible de rester sur le vélo. Le long de la route, il y a des petits arrêts de bus. J'en profite pour prendre des pauses à l'abri du vent. Il ne fait pas trop froid, 15°C mais je porte ma veste et mon buff (tour de cou). Le vent est plutôt frais. Vers 17h, je rencontre Matt un anglais qui est en train d'essayer de monter sa tente en plein vent. Il est exténué et n'a plus la force de continuer jusqu'au refuge qui se trouve à 15km. Il est découragé par le vent de face depuis Ushuaia. Il me dit " si le vent continue comme ça les prochains jours, je prends un bus et je me tire d'ici ". Moi aussi je suis fatigué mais je fais quand même les 15km jusqu'au refuge de bord de route. Une petite cabane en tôle, rouillée et sale. Mais au moins je suis à l'abri du vent.
Les jours suivants, le vent souffle toujours fort mais c'est acceptable. 10km/h sur le plat. Le décor, une  toundra rase à perte de vue, n'a rien de grandiose. Entre Puerto Natales et Torres del Paine c'est un peu plus vert et vallonné avec quelques montagnes enneigées en fond.
Demain je repasserai en Argentine pour quelques jours. Direction le nord par la route 40 au milieu de pampa.

Faire 100km par jour, à contre vent en Patagonie, c'est assez difficile voire impossible. Certains jours j'ai mis plus de 10h pour parcourir péniblement 80km. Les jours sont très longs en cette période, 5h-22h. Je roule de 6h à 19h, tout en faisant pas mal de pauses, et même une petite sieste quand je trouve un abri vers midi. Le bruit et la force du vent me fatiguent.
Il n'a pas fait trop froid durant ces dix jours. Un matin j'ai eu -4°C, sinon c'était plutôt 5°C le matin et 15°C l'après midi. Un seul jour de pluie depuis Ushuaia. Même si le ciel n'est pas toujours bleu, certains jours sont nuageux mais sans pluie. Un grand soulagement après plusieurs mois de quasi pluie continue en Australie et Nouvelle-Zélande.


Statistiques

Distance :  477 km
Nb jours : 6
Nb jours de vélo : 4
Nb jours de repos : 2
Etape la plus longue : 139 km
Etape la plus courte :  72 km

Total depuis le début

Distance : 30714 km
Nb jours : 429
Nb jours de vélo : 294
Nb jours de repos : 135
Etape la plus longue : 257 km ( Australie, Nullarbor)
Etape la plus courte : 26 km
Plus haut col : 3045 m (Yunnan, Chine)
Crevaison : 11
Rayon cassé roue arrière: 9 ( ancien vélo décathlon à 100€)
temp. max/min : 49°C ( Australie) / -8°C ( Australie)
La Suite...