27/10/2017

Pérou : El gringo en la sierra

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24/07/2017 - 07/08/2017 ; Lima - Huaraz - BambamarcaEl alamor

Je sors de Lima la capitale du Pérou sans trop de soucis. Pas mal de trafic mais pas aussi dense que je l'avais imaginé. Quelques kilomètres au nord, la Panaméricaine se sépare en deux. Une route directe par la côte accessible seulement aux camions et une route qui fait un détour "inutile".
Pourquoi accessible seulement aux camions ?
Aucune idée !
Je prends la route directe, réservée au poids lourds, car je sais qu'ici au Pérou les panneaux, sont là pour la "figuration". Personne ne les respecte. Je fais comme tous les péruviens, je transgresse les règles. Au péage, la police est là, mais je passe innocemment, sans les regarder. Aucun camion ne semble étonné de me voir là. Pas de coup de klaxon intempestif . Le paysage ne change pas: des dunes de sable sur la droite et l'océan Pacifique sur la gauche.

Après presque 200km je repars vers la montagne. Je préfèrerais suivre la côte, profiter du vent de dos et des longues routes plates, mais cette partie du Pérou est réputée dangereuse pour les cyclistes. Encore cette année plusieurs cyclistes se sont fait braquer par des mototaxis.
Le ministère des affaires étrangères classe certaines zones au Pérou comme dangereuses alors qu'elles sont tranquilles ! Cette partie là qui n'est pas sûre n'est pas indiquée sur leur site internet. C'est à n'y rien comprendre. En tout cas je préfère éviter cette zone qui s'étend de Trujillo jusqu'à Chiclayo. Je bifurque donc vers la montagne. J'aime les grands cols et leurs paysages, mais je suis pressé. Mon frère arrive en septembre au Costa Rica et il me reste beaucoup de chemin à parcourir.

Je suis au niveau de la mer. Le premier col est à 4140m d'altitude, 125km de montée ! Je grimpe en deux jours: 50km le premier, je dors à 800m d'altitude suivi d'une grosse journée de 75km pour 3340m de dénivelé positif. Je monte, monte et monte. Les premiers kilomètres sont durs. J'ai un nuage de chitras autour de moi. Ce sont des moucherons suceurs de sang qui me dévorent. Contrairement aux moustiques, ces insectes vous mordent et vous font saigner ! Impossible de s'en débarrasser. Jusqu'à 2500m d'altitude je subis leurs morsures . Puis le froid aidant, la nuée me laisse seul face à la pente.
En fin de journée j'arrive au col. Je monte ma tente, je bois un café et je m'endors comme un nouveau né, emmitouflé dans mon duvet. Le café ou plutôt la caféine n'a aucun effet sur moi après une journée de montagne. Je pourrais en boire des litres et m'endormir  quelques minutes après.
 Au petit matin, tout est gelé autour de moi. J'attends que le soleil fasse fondre le givre de ma tente avant de me mettre en selle. La vue sur la Cordillère Blanche est magnifique. Les sommets enneigés, à plus de 6000m, ont donné son nom à cette partie de la Cordillère des Andes. Les neiges éternelles forment une bande blanche à l'horizon qui illumine le paysage dès que le soleil brille.

Dommage que le trafic routier incessant perturbe le calme de ces montagnes. A chaque fois qu'une voiture s'apprête à me doubler, j'entends un coup de klaxon. Juste pour m'informer: "je te dépasse". Je ne comprendrais jamais cet excès de zèle. Des centaines de klaxons par jours, ça use les nerfs. A la fin de la journée je deviens presque irritable.
Et c'est sans compter les "gringo" que les gens crient quand ils me voient.
Quand je discute avec eux, ils finissent toujours leurs phrases par gringo:
- Où vas-tu gringo ?
- D'où viens-tu gringo ?
- Combien coûte ton vélo gringo ? ...
La ponctuation en quelque sorte.
Selon le ton, le sobriquet "gringo" est affectueux, envieux voire méprisant.




Après avoir traversé la ville surpeuplée d'Huaraz je passe par le canyon Del Pato. Splendide ! Deux grandes falaises de chaque côté. Une route taillée dans la roche et de jolis tunnels. Aucun n'est éclairé, un noir intense, pas un faisceau lumineux dès que le tunnel fait plus de 100m. Je suis obligé d'utiliser ma lampe frontale pour voir et être visible. Heureusement que ça descend, car j'ai un fort vent de face. Impossible de rouler détendu, je dois pédaler en permanence. Arrivé à Chuquicara, à 700m d'altitude, la route remonte. Montées, descentes, je fais le yoyo les jours suivants: entre 1500m et 2000m de dénivelé positif par jour. La route alterne entre piste et goudron.
A l'approche des villages je rencontre quelques véhicules, mais très peu en dehors. Les péruviens qui peuplent ces régions sont pour la plupart agriculteurs ou bergers, et ne possèdent pas grand chose à part un petit bout de terrain et quatres mur en adobe. La terre crue qui sert à la construction des maisons est un excellent isolant qui emmagasine la chaleur solaire dans la journée et la restitue lentement toute la nuit. Ce matériau disponible sur place est essentiel à la construction sur les hauteurs andines.

Je passe quelques bons moments à discuter avec les paysans que je rencontre au bord des routes.
En pleine montée, une femme gardant des brebis m'interpelle :
- Ou vas-tu ?
On discute un petit moment, je raconte un peu de mon parcours, puis avant de partir elle me dit :
- moi aussi j'aimerais connaître le monde, voyager comme toi. Mais tu vois, je n'ai rien à part mes brebis et une petite maison.
Gêné,  je ne sais quoi répondre.
Le même jour je fais la rencontre d'un club de cyclistes de Trujillo, une ville péruvienne sur la côte.  Le responsable m'invite à partager le dîner et à dormir.  Je passe une agréable soirée à discuter de vélo et de voyage. Je questionne les cyclistes sur la vie de tous les jours au Pérou. Une vie simple de péruvien moyen faite de travail la semaine et de sorties en vélo dans la Sierra durant le weekend.

Après onze jours à la montagne je redescends vers la mer et la ville de Chiclayo. 55 kilomètres de pure descente d'un trait de 3000m à 800m d'altitude, le rêve du cycliste ! J'évite la ville Chiclayo en passant par une piste poussiéreuse et je traverse des paysages arides jusqu'à l'approche de la frontière avec l'Equateur.
Sur quelques kilomètres, l'homme a transformé le désert en immenses champs de bananes. Le long de cette route les habitations en tôle succèdent aux maisons closes. De la musique, des filles en petite tenue devant la porte d'entrée, en pleine après-midi. Au moins on devine où les péruviens et peut-être les équatoriens viennent dépenser leur solde.
La cuisine péruvienne, ne casse franchement pas des briques. Des soupes, du riz, du poulet.
Sur la côte je goûte le "ceviche": des poissons crus marinés dans un jus de citron servis avec quelques légumes.
Dans la Sierra la spécialité c'est la cuy (cochon d'inde). C'est un plat rare que je n'ai pas eu l'occasion de goûter. Je ne suis jamais arrivé au bon moment dans les restaurants . Au Laos en Asie j'ai gouté à tout ce qui avait quatre pattes. Pas de regrets, le cochon d'inde n'était pas ma priorité culinaire.

Les prix des plats dans la Sierra du sud étaient équivalent à la Bolivie. 1-3€ pour un déjeuner comprenant soupe et plat principal. Pas cher ! Au nord c'est souvent le double. Pas super bon marché au vu de la qualité de la nourriture.
Je suis revenu aux fondamentaux des vagabonds: cuisine avec mon réchaud à essence: pâtes et riz au menu avec un peu de pain: très bon marché, mais souvent sec et sans goût ☹.

Vous l'aurez compris, la cuisine péruvienne ne m'a pas enchanté. Et je n'ose pas parler du fromage. Enfin ce qu'ils appellent fromage. Une pâte dure qui a quasiment toujours le même goût quelque soit le parfum !

Prix pour Gringo

Le Pérou est un pays bien plus touristique et développé que son voisin la Bolivie. Tout le monde essaie d'en tirer profit. Il n'est pas rare de se voir demander un prix bien plus élevé que les locaux.
C'est le prix pour "gringo".
J'arrive parfois à négocier, mais il m'arrive souvent de repartir sans rien acheter car les vendeurs ne veulent pas baisser le prix. Les péruviens considèrent que le blanc est riche et doit payer plus cher ! Dans ce cas-là je file au supermarché. Les prix sont plus élevés que sur les marchés, mais au moins, je suis sûr de payer le même prix que les péruviens. J'ai moins l'impression de me faire "arnaquer".
Et puis dans la rue où sur les marchés, quand je sors un billet de 20Sol (5.5€) ou plus, les vendeurs font la moue. Ils n'ont jamais de monnaie et ne font pas l'effort d'aller en faire. C'est à moi de me débrouiller pour trouver une âme charitable voulant bien échanger mon billet contre quelques pièces.
Mais "c'est le Pérou".



Statistiques

Distance :  1720 km
Nb jours : 15
Nb jours de vélo : 15
Nb jours de repos : 0
Etape la plus longue :  151 km
Etape la plus courte :  69 km

Plus haut col : 4140 m, Conococha

Total depuis le début

Distance : 48005 km
Nb jours : 680
Nb jours de vélo : 478
Nb jours de repos : 202
Etape la plus longue : 257 km ( Australie, Nullarbor)
Etape la plus courte : 26 km
Plus haut col : 5130m, Abra Azuca, Pérou

Crevaison : 12
Rayon cassé roue arrière: 9 ( ancien vélo décathlon à 100€)
temp. max/min : 49°C ( Australie) / -10°C ( Paso San Francisco, Chili)





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