23/08/2018

Ouganda - Rwanda

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04 avril 2018 - 16 avril 2018 : Kampala - Kigali

Ouganda

            Avant de passer la frontière je fais réparer mes chaussures pour 0.40€. Le "cordonnier", qui est assis par terre le long de la route, coud ma semelle avec du fil épais. Un rafistolage en cinq minutes qui ne durera sûrement pas longtemps mais au moins mes chaussures sont en un seul morceau.
Le passage de la frontière n'est pas trop chaotique. Je m'attendais à pire au vu du grand désordre qui règne dans le village. Pour ne pas changer, la douanière me demande 10$. Je dis non et elle me laisse passer sans problème.
Je ne m'habituerai jamais, mais je comprends qu'il est plus facile de demander de l'argent à un blanc que de se mettre au travail. Quand je réponds "non". Beaucoup disent : "OK" et continuent leur chemin sans insister !

             Mon visa qui couvre aussi l'Ouganda est rapidement validé. Après avoir changé mon argent au marché noir, je continue la route: peu de trafic et pas de villages surpeuplés. Seules quelques huttes difficilement visibles jallonent le parcours. Je suis heureux ☺. Aucun "Mzungu give me money". Les gens et les enfants me saluent normalement : " Mzungu Jambo"(Salut le blanc). J'aperçois même au bord de la route des babouins qui ne s'éloignent pas trop de la route sur mon passage. Ces singes chapardeurs habitués au trafic routier, que je surveille toujours du coin de l'œil  sont très vifs pour ramasser ou chiper tout ce qui se mange.
Serais-je arrivé dans le monde sauvage ?
Pas du tout, l'illusion ne durera que quelques dizaines de kilomètres.
Quand je récupère la route principale vers la capitale, les villages qui se succèdent font de nouveau partie du paysage au milieu des champs de riz, canne à sucre, pâturages, ... Pas de grande différence avec le Kenya. Si ce n'est que la culture de la bouffe de rue est plus étoffée. Avec les traditionnels beignets, je trouve des chapatis, des haricots, des soupes. Je mange aussi le plat de luxe nommé "rolex" , un chapati fourré avec œuf, tomates et oignons. Le nom vient de la déformation de l'expression anglaise "rolled eggs". C'est plutôt bon. Le plat de haricots rouges avec chapatis est un Kikomando. J'adore l'inventivité des appellations. Comme au Kenya, le menu n'est pas gourmet, mais ça nourrit. Et puis ce n'est vraiment pas cher. Un kikomando dans un grand bol coûte entre 0.30€ et 0.50€, un chapati 0.20€, le luxeux rolex 0.50€, un épi de maïs grillé 0.10€, ...

             Les barrages policiers sont nombreux tout le long de la route. Je ne comprends pas bien  à quoi ils peuvent servir.
A sécuriser la route ?
A nourrir la corruption ?
Sûrement un peu des deux !
Aucun policier ne m'a arrêté et encore moins sourit. Avec leur tenue blanche et leur lunettes de soleil, ils ressemblent à des généraux de république bananière comme dans une bande dessinée.
Les ougandais sont plus timides que les Kényans. La pression est moins forte, bien qu'ils essaient souvent de me réclamer quelque chose. Comme au Kenya on trouve de minuscules écoles de deux à trois classes surpeuplées en pleine savane en dehors des villages. A la sortie des classes tous les jeunes enfants sont curieux de voir le Mzungu passer. Ils courent pour arriver au bord de route et me saluent en tapant des mains et en criant : "Mzungu, Mzungu, ...". Je les remercie d'un signe de la  main tout en souriant. C'est agréable, pourtant je ne m'arrête pas pour éviter les attroupements.

              Mes journées sont en phase avec le lever et le coucher du soleil. Six heures, au petit jour, après mon café, je plie ma tente et je commence ma journée de vélo. Il y a déjà du monde. Les ougandais qui marchent au bord des routes sont aussi matinaux que moi ☺. Généralement pour le petit déjeuner, je prends des fruits et des chapatis. Au menu du midi, rolex ou kikomando et le soir le repas se limite à un bon plat de pâtes. Comme c'est la saison des pluies, tous les jours en fin d'après-midi j'ai droit au rafraîchissement venu du ciel. J'essaie de m'arrêter avant que la pluie ne commence à me tremper.  Avec un peu moins de monde qu'au Kenya, trouver un endroit où planter sa tente est un "tout petit peu plus facile". Bien que quelques villageois aient aperçu mon campement, personne n'est jamais venu me déranger. Je ne suis jamais très loin d'un village et souvent je peux entendre les chiens aboyer, le coq chanter et la musique. Les radios crachent un son fort et saturé du matin au soir et même au-delà jusqu'à tard dans la nuit ☹.

               Juste avant Kampala, je plante la tente dans un champ de cannes à sucre. Tout semblait parfait, sauf qu'à la nuit tombée des centaines de termites ont attaqué ma tente. Au petit matin je constate les dégâts: elles ont "mangé" le sol de ma tente qui est maintenant percé de centaines de trous. Le lendemain, dans une sorte d'échoppe de bord de route, j'achète  une nappe de table en toile cirée pour protéger ma tente des insectes agressifs. Cette protection est lourde mais tellement bon marché, 1€.

               L'arrivée à Kampala la capitale n'est pas si horrible que je le pensais. Le trafic est moins dense qu'à Nairobi la capitale du Kenya.  Il n'y a pas grand chose à voir dans les grandes villes africaines et Kampala n'échappe pas à la règle. C'est un immense "village" avec un foutoir monstre pour des yeux d'européens. Les piétons zigzaguent entre les voitures et les deux-roues roulent à contre-sens sur les trottoirs ou sur les terrains vagues qui servent de bas-côtés. Dans la circulation, c'est la loi du plus fort ou plutôt du plus "gros" qui s'impose : avec dans l'ordre: camions, 4X4, voitures, moto, vélos, ...  De petits malins plus culottés que les autres arrivent à perturber cet ordre établi en grillant la priorité aux plus gros qu'eux au prix de risques insensés.

              Je me repose trois jours chez Bab, un ami de Pierre, un jeune français qui m'avait hébergé à Nairobi. Mon hôte est un jeune kenyan aisé qui vit dans une maison récemment offerte par son père. Comme beaucoup d'expatriés, Bab a une personne à son service qui s'occupe de tout. On peut appeler ça un homme à tout faire ou un "valet".
En arrivant c'est Nathan qui m'accueille.  Il a une vingtaine d'années, a quitté sa femme et sa fille  qui vivent au nord de l'Ouganda pour venir travailler dans la capitale. Il travaille 24 heures sur 24, 7 jours sur 7 pour 50$ par mois, nourri, logé et blanchi. Avec son maigre salaire, il arrive à faire vivre sa famille et envoyer sa fille à l'école. Il est toujours souriant et super positif. Avec un certain fatalisme, il ne se plaint pas de sa condition. Son employeur et "maitre" est souvent en déplacement entre le Kenya et l'Ouganda et il lui paie son salaire sans délai chaque mois. Ce qui n'est pas si courant dans la société "féodale" et urbaine africaine, où les plus aisés traitent souvent les employés venus des campagnes comme des serfs.

               Un soir alors que Bab est parti faire la fête, je reste avec Nathan et ses amis. Je lui  donne 2$ pour acheter les ingrédients nécessaire à la préparation  d'un repas pour nous tous.  Sur un réchaud à bois à même le sol, Nathan nous fait de fabuleux chapatis☺ que nous dégustons assis sur une natte en roseau tout en discutant. Ces jeunes ougandais de famille pauvres ont des projets pleins la tête dans cette Afrique de l'Est en pleine croissance: un petit commerce, une mototaxi ou simplement un bout de terre pour être autosuffisant.  Pour clôturer le repas ses amis me proposent de l'alcool conditionné en sachet. C'est la première fois que je vois ça. En Amérique Centrale l'eau était vendue en sachet mais pas l'alcool. Rien de tel pour être bourré: c'est pas cher et efficace. Par contre le goût est horrible comme de l'alcool à brûler de "mauvaise qualité" !

                  Mon expérience de sept jours à travers l'Ouganda est restée cantonnée aux routes principales. Avec la saison des pluies, je n'ai pas eu la force d'affronter les pistes boueuses. Je ne peux en aucun cas dire que ma vision du pays est "complète".
Une prochaine fois peut-être.





Rwanda

               La file d'attente à la frontière entre l'Ouganda et le Rwanda est longue de plusieurs centaines de mètres. Comme à mon habitude, je double toutes les voitures et camions. En suivant la file il me faudrait deux jours pour passer d'un pays à l'autre. Avec mon visa "East Africa" qui couvre le Kenya, l'Ouganda et le Rwanda le passage par la douane est presque facile. Comme dans un grand nombre de pays il faut remplir un formulaire "bidon" (nom, prénom, numéro de passeport, ...) dont tout le monde se fout.
Mais c'est nécessaire.
Evidemment il y a toujours la case : "adresse dans le pays" qu'il faut absolument compléter bien que l'administration locale sache que tu es touriste et que tu n'a pas forcément réservé un hôtel ou un appartement pour tout ton séjour !
Cette fois-ci j'ai inscrit "Camping Kigali". Camping c'est mon quotidien et Kigali est la capitale. Rien de plus simple du moment que le champ est rempli !
Et ça passe.
"Putain de bureaucratie inutile" !

               Après l'Ouganda où les villages étaient vivants, je passe au Rwanda où les quelques hameaux près de la frontière sont vraiment très calmes. Peu de commerces qui ne vendent que de la mal bouffe industrielle. Pas de fruits ou légumes. Pas de cuisine de rue. C'est le néant culinaire!
Heureusement le décor jusqu'à Kigali est extraordinaire. Le Rwanda est bien le "pays des milles collines". La route vers la capitale traverse une vallée à mille cinq cents mètres d'altitude où la population vit exclusivement de la culture du thé.  Les plantations couvrent les petites collines à gauche et à droite de la route à perte de vue. Quand le brouillard du matin s'évapore on voit apparaitre un paysage d'un vert brillant, grandiose et reposant. Je monte et je descends des dizaines de côtes faciles sous un climat humide adouci par l'altitude.
J'adore !

              En ce mois d'avril où la pluviométrie est la plus forte de la saison des pluies, prendre les pistes me m'a guère tenté. J'ai suivi la route principale dont certaines portions dépourvues de goudron faisait place à une piste boueuse de couleur rouge. Une terre pas trop collante qui ne m'a pas empêché d'avancer mais qui m'a régulièrement transformé en bonhomme de boue. Le soir, quand je suis dans un état lamentable, la douche à l'aide de ma bouteille est vraiment indispensable !

              Au Rwanda les transports en commun sont inexistants. C'est le royaume des taxis en tous genres : voitures, motos et vélos.
Avec des jeunes au guidon, les vélos-taxis pullulent dans les zones où la route est plate. Un porte-bagage made in Africa en fer forgé "maison" sur lequel est attaché un coussin aux milles couleurs sert de siège pour le confort du passager. D'autres vélos robustes transportent un poids ou un volume impressionnant: plusieurs régimes de bananes, des dizaines de bidons d'eau ou des kilos de fruits.
 Les conducteurs sont super sympas et souriants avec moi, mais ils n'aiment pas du tout se faire doubler par un blanc avec un vélo chargé. A partir du moment où je les dépasse, ils accélèrent le rythme pour me suivre et pour les meilleurs réussissent à me doubler. Ils peuvent me suivre pendant plusieurs kilomètres. La barrière de la langue fait que la discussion tourne court. Le Rwanda est une ancienne colonie française où beaucoup de lieux et de commerces portent encore des noms français. Mais les jeunes ne le parlent plus. Ils baragouinent tout juste quelques syllabes d'anglais enseignées à l'école primaire.
Les montées sont extrêmement difficiles pour eux avec leurs vélos qui ne possèdent pas de vitesse. Deux solutions : marcher en poussant son vélo ou s'accrocher derrière un camion pour grimper sans effort. Il n'est pas rare de voir quatre à cinq vélos-taxis accrochés par le bras derrière un camion hors d'âge crachant une fumée noire dans les montées !

                 Petite anecdote avant de finir cet article.
Juste après avoir traversé la frontière du Rwanda, je cherchais un point d'eau pour me ravitailler. Je m'arrête dans un village où je vois une sorte de fontaine avec des robinets.
Surprise en arrivant sur place: de petits malins ont enlevés la manette des robinets !
Un jeune rwandais s'approche de moi et me dit :
"Water ? Give me money"
Je souris, et lui réponds fermement:
- NON !
- Je ne paie pas pour de l'eau publique.
Ouvrir un robinet, il n'y a rien de plus facile. Je sors de mon sac mon outil magique : la clé à molette. Juste au moment où je présente la clé pour ouvrir, arrive le vieux "gérant"  avec la manette à la main. Je remplis mes bouteilles, je remercie le "maître" du robinet et je fais un joli sourire au gamin qui voulait obtenir quelques centimes d'euros. Puis je pars comme un prince ☺ au milieu d'une dizaine de personnes qui entre-temps s'étaient amassées autour de moi. Un rite habituel !

Bye bye Rwanda, prochaine étape la Tanzanie



Statistiques

Distance : 935  km
Nb jours : 13
Nb jours de vélo : 9
Nb jours de repos : 4
Etape la plus longue :  137 km
Etape la plus courte :  78 km

Total depuis le début

Distance : 64039 km
Nb jours : 925
Nb jours de vélo : 627
Nb jours de repos : 298
Etape la plus longue : 257 km ( Australie, Nullarbor)
Etape la plus courte : 26 km
Plus haut col : 5130m, Abra Azuca, Pérou
Crevaison : 21
Rayon cassé roue arrière: 9 ( ancien vélo décathlon à 100€)
temp. max/min : 49°C ( Australie) / -15°C ( Utah, USA)

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